La Transition aux lisières – L’écopâturage

EXPÉRIMENTATION DE L’ÉCO-PÂTURAGE AVEC DES MOUTONS A LA CCLO
En suivant l’exemple d’autres collectivités, la Communauté de Communes des Lisières de l’Oise a pris la décision de tester l’éco-pâturage sur ses terrains intercommunaux. Durant le mois d’avril, des moutons de race Ouessant ont brouté les espaces enherbés autour des locaux du siège social de la CCLO à Attichy.
Fin mai, une autre zone de pâturage a été mise en place à l’arrière du Complexe Sportif et Culturel à Couloisy. L’entretien des espaces publics avec des animaux est, à bien des égards, une excellente alternative à la tonte mécanisée.

« Mais pour que le pâturage soit bien de l’éco-pâturage, il faut que l’impact positif sur la biodiversité soit maximisé et pour cela, il faut suivre quelques règles de mise en œuvre afin de respecter l’environnement. »
Ce projet d’éco-pâturage a germé à la suite d’une formation dispensée par le CAUE 60 et le CPIE des Pays de l’Oise en octobre dernier. À destination des agents techniques communaux, intercommunaux et des élus, la journée avait pour thème : « La gestion et l’embellissement durable des espaces verts ».
Parmi les différents modes de gestion exposés, le pâturage a rapidement retenu l’intérêt. Cette technique consiste à faire paître des animaux herbivores : moutons, ânes, oies, lapins, chèvres etc… sur différents espaces pâturables tels que des plateaux calcaires, des zones humides et des espaces verts en général.
Pour un pâturage raisonné, il est nécessaire que le nombre d’animaux par unité de surface ne soit pas trop important afin de laisser le temps à la végétation d’accomplir son cycle. Mais il ne faut pas non plus que le nombre d’animaux soit trop faible, car sinon les plantes ligneuses risquent de se développer rapidement au détriment d’autres espèces. Un autre point primordial est celui du choix de la race. Ce n’est pas un hasard si les races rustiques sont privilégiées pour l’éco-pâturage.
Ces animaux étant plus résistants aux maladies et aux parasites, les traitements surtout anti-parasitaires sont donc limités. Ces médicaments peuvent se retrouver à plus ou moins forte concentration dans le sol via les déjections. Non seulement, ils dégradent la qualité de l’eau, mais aussi perturbent les vers de terre et les insectes coprophages. Le mouton Ouessant fait partie de ces races rustiques. Originaire de l’île bretonne du même nom, il ne craint pas les mauvaises conditions climatiques et peut vivre dehors toute l’année. Noir, blanc ou avec des nuances de brun, il est de petite taille et apprécie la vie en troupeaux. Enfin, en choisissant une race rustique pour l’éco-pâturage, cela contribue à la sauvegarde de la race, mais comme ces animaux sont assez mal connus du grand public, la communication doit être renforcée.
« Il faut savoir s’entourer de spécialistes, car faire de l’éco-pâturage, cela ne s’improvise pas. »
L’éco-pâturage peut être mis en place de différentes manières. Pour notre part, nous avons décidé de nous rapprocher d’une association spécialisée : l’Établissement et Service d’Aide par le Travail (ESAT) de l’Arche basé à Trosly-Breuil, commune du territoire de la CCLO.
Non seulement, elle s’occupe entièrement du troupeau, mais elle est également à l’écoute de nos attentes et s’adapte à nos demandes. Comme nous l’avons évoqué plus haut, l’intérêt de l’éco-pâturage pour la biodiversité dépend du bétail et de la manière dont le pâturage est réalisé.
C’est pour cette raison que la tâche peut vite devenir insurmontable si on improvise. Selon les caractéristiques des espaces à entretenir, zones humides, friches ou prairies, un certain type de bétail sera plus adapté qu’un autre. De plus, sur la période de pâturage qui s’étend d’avril à novembre, le nombre d’animaux doit être rectifié (ajout ou retrait d’animaux) afin de contrôler l’évolution de la végétation dans le sens souhaité.
Les contraintes liées au déplacement des animaux se posent alors ainsi que le chargement des moutons dans la bétaillère. D’ailleurs, l’éleveur de l’ESAT possède des chiens de travail, de race Border Collie pour faciliter ce chargement. Mais la compétence essentielle est certainement celle qui garantit le bien-être des animaux et pour cela l’œil du spécialiste est primordial.

Au moins une fois par semaine, l’équipe expérimentée de l’ESAT de l’Arche se rend sur les lieux de pâturage, pour anticiper la nécessité du changement de parcelles, détecter au plus tôt la dégradation de l’état de santé d’un mouton et lui prodiguer les soins nécessaires ou encore vérifier que la quantité d’eau est suffisante lors des canicules. La rapidité d’intervention en cas de constat d’anomalie est assurée par le fait que l’ESAT ne se trouve qu’à quelques dizaines de kilomètres des zones de pâturage.
« Le bien-être animal : effet miroir sur le bien-être humain »
Au-delà du gain sur l’environnement, engendré par une gestion raisonnée des espaces, il est avéré que la présence d’animaux est particulièrement vectrice de liens sociaux. Au travail, les interactions entre collègues sont favorisées. Il est souvent le moyen d’entrer en contact avec d’autres travailleurs avec qui les échanges ne sont pas ou peu habituels. Dans un climat de bonne humeur, les interactions sont encouragées. Le constat a été immédiat au siège social des Lisières. Chacun se questionnant et relatant ses propres expériences. Toute cette synergie favorise le bien-être au travail. Ce constat, les responsables de l’ESAT de l’Arche nous l’ont également décrit. L’éco-pâturage a un réel intérêt pédagogique et thérapeutique pour les travailleurs en situation de handicap et est source d’épanouissement.
Cette semaine, les travailleurs de l’ESAT ont déplacé les moutons à proximité du complexe sportif et culturel à Couloisy, près du collège, d’un commerce et d’habitations. Nous espérons que les retours seront tout aussi positif et que les animaux seront vite « adoptés » par les riverains. Nous serons attentifs à recueillir régulièrement leur point de vue. Il ne faut pas négliger le fait que mettre en place l’éco-pâturage dans un espace public demande certaines précautions et doit se faire progressivement.
« Une mise en place pas à pas pour un meilleur résultat »
Nous avons décidé de déployer le projet par phase. Dans cette première phase définie comme « test » les parcelles sont délimitées par des filets mobiles électrifiés. Cela permet de ne pas fixer définitivement la zone de pâturage et facilite les réajustements grâce au déplacement simple et rapide des clôtures. Un pâturage tournant est mis en place par le prestataire, il consiste à diviser l’espace en parcelles de plus petites tailles et de mettre en place un temps de rotation entre chaque parcelle d’environ 3 semaines. Plusieurs avantages à cette technique, tout d’abord, il évite des périodes trop grandes de piétinement des sols par les moutons. De plus, cela permet un temps de repos entre deux pâturages assurant ainsi une bonne régénération des plantes.
L’herbe n’est jamais pâturée trop rase. Le surpâturage est à éviter absolument, car non seulement il est néfaste pour l’environnement mais également pour la santé des animaux du fait d’un risque de parasitisme. La bonne réalisation technique est certes nécessaire, mais ne sera jamais suffisante. Les Hommes ont besoin d’être convaincus.

« La clé de la réussite : sans nul doute, la communication »
Prendre le temps d’expliquer, de rassurer pour mieux gérer le changement. Le projet a d’abord été exposé aux membres de la commission environnement.
Une fois que l’aval a été donné, un agent de la collectivité, par site de pâturage a été nommé pour être le référent et l’interlocuteur privilégié pour faire le lien entre les travailleurs ou les riverains et le prestataire ESAT.
Les explications verbales au cas par cas resteront toujours le meilleur moyen de faire connaître la démarche, mais pour que le plus grand nombre soit informé, il faut multiplier les canaux de communication.
Grâce à la mise en place de panneaux sur place, nous avons tout d’abord annoncé l’arrivée prochaine des moutons ensuite des flyers ont été distribués aux riverains et des affiches apposées au niveau du complexe intercommunal.
Enfin, le dispositif a été relayé sur les réseaux sociaux de la collectivité et un communiqué de presse a été transmis aux médias. Ce bulletin d’informations vient compléter notre stratégie de communication.
D’autres leviers pourraient être activés comme l’organisation d’ateliers de sensibilisation avec les scolaires, des démonstrations de conduite de troupeaux avec un chien de travail ou encore tenir un stand sur place pour répondre à toutes les questions des riverains.
Cette initiative de l’éco-pâturage sur le domaine public n’est qu’à ses prémices sur le territoire de la Communauté de Communes des Lisières de l’Oise mais la commune de Trosly-Breuil s’est également lancée dans la démarche. Un premier retour d’expérience pourra déjà avoir lieu à la fin de la saison. Nous inviterons, cet automne, l’ensemble des communes de territoire pour un temps d’échange autour de cette thématique à l’occasion de la 3ème journée du Club des Services Techniques. D’autres communes auront peut-être envie, elles aussi, de tester une saison d’éco-pâturage.